Depuis le 22 février dernier, VEJA propose son modèle de baskets V-90 et il n'est pas labellisé "made in Brasil" mais "made in Portugal". Cette paire de baskets est donc produite en Europe et ce exclusivement pour le clients européens de la griffe française.

Une nouveauté pour la marque fondée en 2005 qui depuis ses débuts produits ses souliers composés de coton biologie et agroécologique au Brésil.

L'occasion pour Marie Claire d'échanger avec l'un des ses cofondateurs et de faire le point, plus tard dans cet article, sur les baskets emblématiques de VEJA.

Le nouveau projet de VEJA, produire en Europe pour l'Europe

C'est dans le secret, depuis plus d'un an, que VEJA a commencé à produire ses V-90 au sein de l'usine SAMBA Footwear. On parle là d'une entreprise nichée à Porto et réputée pour son savoir-faire en matière de fabrication de chaussures.

Une société qui créé des souliers pour de grands noms de la mode tels que Vivienne Westwood, Clarks, et qui fabrique désormais les sneakers VEJA réservées au marché européen.

Un tournant dans l'histoire de l'enseigne française qui a toujours produit ses items durables en Amérique du Sud. Nous sommes également à la veille du 20e anniversaire de VEJA, et tous ces temps forts nous ont inspirés à poser quelques questions à Sebastien Kopp, co-créateur de la marque.

Marie Claire : Après avoir produit exclusivement au Brésil, VEJA lance sa seconde filière de production au Portugal. Parlez-nous de ce projet que vous avez intitulé AEGEAN PROJECT.

Sebastien Kopp : "AEGEAN" veut dire Égée. Nous avons a pensé à la mer Égée que l'on considère comme le berceau de l’Europe et par là, on voulait faire référence à ce nouveau projet Europe qui consiste à produire en Europe pour l'Europe.

C’était très naturel pour nous d'aller au Portugal, au regard des conditions de travail, du respect des droits des travailleurs, des salaires et de pouvoir d'achat. Le fait que nos équipes soient bilingues portugais nous facilite également. C'était la première fois qu'on sortait du Brésil, VEJA a commencé à produire secrètement au Portugal en 2023 pour caler les productions. Plus de 80 000 paires y ont déjà été produites, et maintenant, on lance une gamme spéciale qui est produite en Europe et vendue qu'en Europe.

Ça nous permet d'ouvrir une nouvelle filière écologique et d'employer plein de matériaux avec lesquels on désirait travailler en Europe. Jusque-là, on trouvait que c'était une hérésie de trouver des matériaux en Europe pour ensuite les envoyer au Brésil et produire les baskets pour les exporter ensuite partout dans le monde.

Là, on créé des nouvelles chaînes de matériaux écologiques mais qui sont plus localisées et ça nous permet de travailler avec de nouveaux partenaires aussi.

C'est un premier pas qui représente 3, 4, peut-être  5% de la production donc on ne dit pas que Veja relocalise en Europe, c'est un projet qui grandira et on verra sur le long terme.

Marie Claire : Comment vous est venue l’idée de développer une chaîne d'approvisionnement en Europe pour produire localement ?

Cela faisait longtemps qu’on voulait produire au Portugal. Notre première visite remonte à 2009 ou 2010. Vous allez vous dire qu'on est très lents. D'autant que le risque que les usines brésiliennes arrivent à saturation en raison de la croissance de la marque traversait nos esprits.

Mais hormis cela, on avait un autre grand projet local : on a ouvert "Veja General Store", une nouvelle cordonnerie à Paris qui est un lieu dédié à la réparation et au recyclage. On a ouvert notre première cordonnerie en 2020, puis on en a ouvert une à Berlin, à Madrid et ça fonctionne super bien à chaque fois. On intègre souvent la cordonnerie dans nos boutiques avec deux ou trois cordonniers. Cette fois, on inaugure un lieu dédié à la réparation pour en faire un centre d’expérimentation aussi.

On est deux garçons très terre à terre, ça tombe bien pour les fondateurs d’une marque de baskets.

Et pourquoi avoir choisi le Portugal ? Comment François-Ghislain Morrilion et vous avez sélectionné l'usine Samba Footwear qui a la particularité de produire pour d'autres célèbres marques ?

Nous avons fait plein de visites. C'est simple, le coeur de Veja, c'est le terrain. On visite, on regarde, on commence des discussions. C'est le même procédé que lorsqu'on nous propose des matériaux écologiques. Dans ce cas-là on nous contacte, on demande à organiser des rencontres, et on s'informe sur les usines [de ces commerçants].

Le fait d’aller sur place change tout : votre vision, vos connaissances, votre ouverture au monde. Et le seul secret de VEJA s'il y en a un, c’est celui-là, c’est d'aller sur le terrain. On est deux garçons très terre à terre, ça tombe bien pour les fondateurs d’une marque de baskets.

Dans l'usine SAMBA Footwear au Portugal, vous produisez un nouveau modèle intitulé V90 vendu exclusivement pour l'Europe. Parlez-nous de cette nouveauté.

C’est une nouvelle paire qui a été lancée en septembre et qui fonctionne super bien. Longtemps, le problème de VEJA a été le confort, car notre forme de chaussures était bien ajustée pour les femmes et trop étroite pour les hommes, tandis que notre cuir écologique n’était pas assez soft.

En ayant réglé tous ces problèmes, on obtient cette paire de basket très confortable à porter.

Quels sont les objectifs que vous vous êtes fixés avec cette production locale ?

On ne se fixe jamais d’objectifs. On fait au mieux et on voit si ça marche ou non. Le public décidera.

Une aventure qui a débuté il y a près de 20 ans

Revenons près de 20 ans en arrière, à quoi ressemblait le marché de la sneaker à l'époque où vous lanciez VEJA ?

Comme aujourd'hui, le marché ressemblait à l'époque à un monde impénétrable avec ses entreprises bien établies, Nike et adidas, que l'on connaît bien.

Ce qui a changé à mon sens, c'est que les baskets sont devenues plus nobles. Quand on lance VEJA et que ça commence à bien fonctionner directement, les journalistes mode de l'époque, et ce n'est pas méchant, nous disaient "Ce n'est pas de la mode. C'est des baskets, c'est du sport."

Aujourd’hui les sneakers sont devenues un accessoire de mode important comme peuvent l'être les sacs et les vêtements. La vision du public et la perception des professionnels ont changé.

Sur le reste, à savoir les conditions de production, la traçabilité écologique des matériaux : VEJA a fait bouger les lignes mais pour les autres marques, j'ai le sentiment qu'il y a beaucoup de discours qui sont faits mais que les choses n’ont pas beaucoup changé. Ça va peut-être venir maintenant, je l’espère.

Combien de baskets produisez-vous par an les premières années ?

Notre première production, c'était 5 000 paires pour le monde entier. Au début, VEJA n'était pas une entreprise, c’était plutôt une aventure. Tout le monde nous promettait l’enfer et nous disait que ça ne marcherait jamais, puis il n’y avait pas le web à l'époque.

Finalement, on a vendu nos 5 000 paires à quelques magasins, en 3 jours ils n'avaient plus rien et ils voulaient du réassort. Ce qu'on a refusé en répondant “non, ça n'arrivera que dans 6 mois”.

Puis on a grandit petit à petit en contrôlant notre développement car on était limités en matières premières. Certes on doublait la production de coton bio tous les ans mais on ne pouvait pas la multiplier par 5 ou par 10 alors on était en dessous de la demande pendant des années. Ça nous a permis d’avancer à notre rythme sans faire d'erreurs.

Au bout de 3-4 ans, on a su que c'était le projet de notre vie. Il y a beaucoup de ce en quoi on croit dans VEJA : c'est-à-dire le fait de ne pas avoir d’investisseurs, de ne pas faire de pub, ni de soldes ou alors très peu. Produire à la demande donc ne pas avoir de stock.

Produire bien sûr de façon écologique en faisant un travail dont personne ne se soupçonne l'ampleur, bien que ces dernières années on y prête moins attention, mais tout le travail d’aller chercher sur le terrain tous les matériaux, ce qui crée des situations et des rencontres assez extraordinaires,  aller sourcer nous-mêmes le cuir, le coton bio, le caoutchouc...

Ça nous permet aussi d’avoir une vision différente de l’industrie. Beaucoup d'autres marques font une commande à une usine et ne savent pas qui, quoi ou comment sont sourcés leurs matériaux.

On a 19 ans cette année et on possède seulement 6 magasins, on ouvre un magasin par an et c'est très bien comme cela. On met chaque fois beaucoup d’amour quand on lance un projet et c'est ça qui nous plait, d’aller à notre rythme.

Vous l'avez dit, il n’y avait pas internet à l’époque où vous lanciez la marque. À quel moment avez-vous réellement senti le succès de la marque ?

Je ne sais pas ce que le mot "succès" veut réellement dire mais dès lors qu'on lançait une production, ça fonctionnait bien, le public était très réceptif alors ma réponse à cette question serait : dès le départ et en même temps peut-être jamais. Dans le sens où le succès est relatif et éphémère, nous on souhaite construire sur le long-terme.

On ne fête pas vraiment nos victoires, on prépare toujours le prochain pas ; c'est un défaut parfois de toujours se projeter dans le futur et regarde ce qu'il faut corriger. Avec mon associé François-Ghislain [Morillion], on est tous les deux très perfectionnistes.

Aujourd'hui, comment voyez-vous l'évolution de la production VEJA au Brésil ?

Nous n'avons n'a pas réellement changé de méthode depuis le début, à part qu'au départ on travaillait avec 27 ou 28 producteurs de caoutchouc dans la forêt amazonienne et aujourd’hui ils sont entre 1 500 et 2000. Le projet a grandit en cercle concentré, on bosse dans une région en particulier où il y a beaucoup de monde et où le projet a fait ses preuves en termes de valorisation de la forêt et de valorisation économique sans la déforester.

Au début, on bossait avec une usine puis deux et maintenant trois, chacune dans son segment : l’une gère exclusivement la performance, donc le running, par exemple. Produire au Brésil c'est : des partenariats à long terme, c'est vivre les succès mais aussi les échecs, les difficultés, le Covid, Bolsonaro. Le travail sur le long terme est précieux pour nous, on adore évoluer avec les gens.

Et il y a d'autres projets. Log’ins est une association d’insertion avec laquelle on travaille pour tout notre stockage du site web et du retail en banlieue parisienne. On a commencé avec une mezzanine de 20m2 aujourd’hui on a un entrepôt de 7 000 m2 avec 80-100 personnes en insertion qui font un boulot incroyable.

C’est beau de voir un projet se développer sur le long court, c’est cela qui nous intéresse : le temps long. Chose que notre société a un peu oublier au profit d'Instagram et de l'intelligence artificielle. Nous ne sommes pas dans cette dynamique.

Il y a beaucoup de ce en quoi on croit dans VEJA

Les baskets iconiques de VEJA

Aujourd'hui, la marque tricolore comptabilise plus de 15 millions de pieds VEJA vendus dans le monde et possède plusieurs adresses à son nom dans les plus grandes capitales comme Berlin et Paris.

Dans son répertoire figurent une belle variété de modèles au design rétro. Et le plus important, et cela tient à coeur au label, ces items sont tous fabriqués dans une démarche écologique. On pense à la basket Recife ou encore à la chaussure Volley.

Si au départ la marque proposait uniquement des chaussures de ville inspirées souvent de l'univers sportif, avec le temps elle a commencé à commercialiser des chaussures de sport. À l'image du modèle Condor : une chaussure de running haute en couleurs et estampillé du très reconnaissable logo "V" de VEJA.

Des baskets stylées qui rencontrent un franc succès, la marque en compte plus d'une. Certaines même que l'on peut considérer comme emblématiques.

Transition toute trouvée vers notre liste des baskets iconiques de VEJA :

1/5

Les baskets iconiques de VEJA : la Volley

VEJA

C'est elle qui a ouvert la voie. On parle bien de la dénommée Volley de VEJA, une basket en cuir plate à semelle fine d'inspiration années 70 qui a vu le jour en 2005.

"Elle est iconique parce que c’était notre premier pied et parce que pendant trois ans c'était notre seul modèle, donc tous l'appelait “la Veja”." nous confie Sebastien Kopp à son sujet. Son lancement était lui mémorable puisqu'en 2005, les cofondateurs de la griffe présente la Volley au Palais de Tokyo a Paris et écoulent 5 000 modèles.

Relancé le 14 mars 2024 après de longues années d'absence, le modèle revient pour plaire aux plus nostalgiques et donner une leçon de style aux plus jeunes.

2/5

Les baskets iconiques de VEJA : les baskets SPMA

Pinterest

Elle répond au doux nom de Veja SPMA, pour "Sao Paulo Mon Amour". Il faut remonter à l'année 2010 pour retracer la naissance de ce modèle résolument rétro qui prend la forme d'une basket montante à semelle fine.

Ça paraît loin, mais au début de la décennie 2010 les sneakers montantes étaient à la pointe de la mode et étaient adoptées par les personnalités dont on saluait le style comme Justin Bieber et Rihanna.

Bien qu'elle ne soit plus commercialisée, on se souvient encore de la SPMA de VEJA en tant qu'élément phare des uniformes colorés et casual-chics des passionnés de mode de cette époque.

3/5

Les baskets iconiques de VEJA : la basket Esplar

VEJA

2011. La marque commercialisant des baskets à semelles en caoutchouc d'Amazonie dévoile "Esplar". Cette chaussure elle aussi fine s'inscrit dans la lignée de la Taua, second modèle VEJA, ou encore de la Grid, autre soulier montante blanc proposé par l'enseigne engagée.

Comme elles, Esplar est le témoin de ce temps pré-explosion du streetwear où les baskets se devaient d'être fines. Cinq ans plus tard, en 2016, une certaine Esplar Velcro débarque et remplace la précédente version Esplar à lacets.

4/5

Les baskets iconiques de VEJA : la basket V-10

VEJA

Elle réunit tous les atouts charmes qui font le succès de VEJA. Elle est fabriquée à partir de coton biologique et sa semelle se compose de caoutchouc sourcé dans la forêt amazonienne. C'est en 2017 qu'est lancée la basket V-10 qui renforce les propositions stylistiques du label de Sebastien Kopp et François-Ghislain Morriliion.

Haute, à semelle plus épaisse, et déclinée dans des coloris qui plaisent autant à la femme qu'à l'homme, elle est considérée comme moderne et indémodable.

5/5

Les baskets iconiques de VEJA : la basket V-90

VEJA

C'est donc elle, la dernière-née de VEJA. Lancée en septembre 2023, cette basket en cuir produite au Brésil est depuis février 2024 produite localement en Europe pour le marchée européen.

Made in Portugal, la basket V-90 se caractérise par une partie supérieure fabriquée à partir de cuir sourcé en Europé et parsemé d'empiècements en suède sourcés eux aussi sur le continent européen et tannés en Italie. Ses lacets sont en coton biologique et elle repose sur une semelle assez haute si on la compare aux modèles VEJA inspirés des chaussures de volleyeurs brésiliens comme la Volley.

La V-90 surfe sur le style athlétique qui faisait des émules dans la mode des années 90. Et de cette décennie, elle puise également son allure rétro et minimaliste.

Ses qualités éthiques et son esthétique léchée justifient le fait qu'on lui concède une place dans cette short-list d'iconiques seulement quelques mois après le lancement de sa produite européenne.

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