Depuis la naissance de la culotte au XVIIIe siècle, homme comme femme sont sommé-e-s d'en faire l'usage pour protéger leurs parties intimes. Un principe qui fait le bonheur des autorités religieuses conservatrices.

Si ce bout de tissu accompagne chacun des mouvements, le port de la culotte n'est pas obligatoire, loin de là. Il est simplement ancré dans les mœurs, trouvant d'autant plus sa justification en ce qui concerne les femmes avec l'apparition des produits menstruels.

Mais alors que beaucoup entendent se détacher des pièces qui brident les corps, le soutien-gorge en tête de file, qu'est-ce qui oblige à porter des sous-vêtements ?

Ces femmes se sont posé la même question avant d'actionner le mode "sans culotte" de manière définitive.

Après un déclic, elles abandonnent la culotte

1992. Feu Vivienne Westwood est nommée officier de l'empire britannique par la reine Elizabeth II.

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Au sortir de Buckingham Palace, la créatrice de mode tout juste décorée parade devant les photographes.

Elle virevolte dans son tailleur jupe gris et en soulevant son jupon en l'air... Son mont de Vénus dénudé est alors exposé en pleine lumière.

Comme la styliste regrettée, bien des femmes tournent le dos aux dessous du bas, laissant derrière elle l'adage vestimentaire parental qui commence toujours par : "D'abord, on met la petite culotte".

C'est une amie qui a donné à Isabelle, 34 ans, l'idée de ne plus porter culotte.

"Vivre sans culotte, c'est ça la vraie liberté", lui souffle sa copine. "On devait avoir 23 ans. J'étais fascinée par l'idée qu'elle puisse être là-devant moi, sans culotte, à l'aise quoi."

Après coup, Isabelle décide d'éliminer le bout de tissu de son rituel vestimentaire. À pas de loup, d'abord en enfilant des collants sans culottes, comme Vivienne Westwood en 1992.

Vivre sans culotte c’est ça la vraie liberté.

Em, 29 ans, a pour sa part cessé de porter des culottes, plaidant une question de confort et de praticité.

Parce que son poids change constamment, elle décide d'abandonner les sous-vêtements plutôt que d'en acheter de nouveaux dans la bonne taille. D'autant qu'elle est déjà adepte du "no bra", le fait d'abandonner le soutien-gorge. L'idée de faire tomber le bas ne lui fait alors plus vraiment peur.

Alice, elle, a arrêté de porter des culottes pour des raisons de santé. Elle se souvient "des mycoses à répétition ou des crises génitales de type maxi irritation".

Un problème qui parle à Annette, 24 ans, elle qui a "arrêté [de porter des dessous] à cause d'un string qui [lui] a donné une mycose. Ça m'a fatigué d'avoir des infections à cause d'une simple culotte."

Les bénéfices du "go commando" par celles qui le pratiquent

Annette et Isabelle ont fait le même constat : sans leur culotte, elles sont nettement moins sujettes aux mycoses vaginales, infections et aux irritations. Pour celles qui préfèrent rester culottées, nos deux témoins auront l'air de prêcher pour leur paroisse.

En effet, nombre de femmes se demandent : n'est-il pas dangereux de poser ses fesses (et sa vulve) presque nues dans l'espace public ? Sur une chaise de restaurant, ou pire, un siège de métro ?

La gynécologue Odile Bagot rationalise : "Ce qui est reconnu comme étant source soit de cystite à répétition, soit d'infections vulvo-vaginales, c'est plutôt le port de protège-slip et de sous-vêtements." En cause, la macération et la persistance de germes qui peuvent se former dans l'un comme dans l'autre.

Pour celles qui vadrouillent sans culotte, le seul vêtement qui recouvre les fesses suffirait donc à faire en sorte de ne pas exposer la vulve à des germes extérieurs.

"Pas de culotte, pas de pression"

Le confort, ne pas avoir une culotte qui glisse entre les fesses, et la jouissance de découvrir la semi-nudité sont d'autres bienfaits cités par les adeptes de ce que les anglophones appellent "go commando".

Supprimer les strings, boxers, et autres types de dessous de sa vie engendre d'ailleurs pour certaines une révision vestimentaire globale.

Em s'autorise maintenant à porter plus de pièces cintrées alors qu'avant, les plis disgracieux de la culotte sous son pantalon lui déplaisaient.

"En ce qui concerne les minijupes et mini robes, je n’en mets plus du tout", ajoute Annette. À la place, elle porte "beaucoup de robes et jupes longues ou mi-longues". Elle raconte :"J'ai banni le jean de ma garde-robe, parce que ça restait un vêtement inconfortable que je n’appréciais pas spécialement dans tous les cas."

Isabelle dit avoir "repensé [sa] garde-robe pour être au maximum de [sa] liberté et au minimum de charge mentale." Les robes à hauteur de genoux et les jupes midi triomphent désormais dans sa penderie.

Alice est plus tempérée : de temps à autre, elle ne porte pas de culotte sous ses jeans. Elle rejoint Isabelle sur la notion de charge mentale allégée.

"Pas de culotte, pas de pression. Puis ça me fait marrer de faire des rendez-vous importants en sachant que je ne porte pas de culotte. Je ne me sens pas plus confiante en moi quand je n'en ai pas, je me sens simplement plus libre."

Vivre sans culotte, un tabou parmi d'autres

Une liberté retrouvée ou un fantasme… Parmi celles qui optent pour le "no panties" au quotidien, toutes ne rêvent pas de rejouer la scène culte de Basic Instinct avec Sharon Stone.

Nadine a 35 ans et elle ne peut plus porter de culottes depuis son premier accouchement. C'était il y a huit ans.

Elle n'a pas eu de déchirure et n'a pas été confrontée à une épisiotomie mal cicatrisée, ce qui aurait peut-être pu justifier ce problème, affirme la gynécologue Odile Bagot. Selon Nadine, les bas de sous-vêtements ne sont tout simplement plus adaptés à sa morphologie. "Ça me serre. Ce sont probablement mes lèvres qui ont changé ou qui ont gonflé, par conséquent le sous-vêtement compresse mes lèvres vaginales et je suis mal à l'aise", confie-t-elle.

Elle précise avoir essayé des culottes plus larges et s'être même tournée vers de nouvelles marques de lingerie. Mais rien n'y fait.

Le médecin traitant de la jeune maman n'a pas relevé, lorsqu'elle lui a fait part de sa nouvelle routine vestimentaire. Elle n'en a en revanche pas touché mot à sa gynécologue. Seul son entourage proche a été mis dans la confidence.

Elle avoue que cet article a été "un élément déclencheur" pour elle qui comptait rester dans le silence : "J'ai eu peur d'en parler. Peur que l'on me dise "oh, la honte", d'autant que je travaille dans l'Éducation nationale, alors je ne peux pas dire ouvertement que je ne porte pas de culottes."

C'est aussi, peut-être, pour que d'autres mamans dans le même cas se sentent visibilisées que Nadine parle de son expérience.

Alors même que le non-port du soutien-gorge semble s'être normalisé ces dernières années, ce non-dit révèle les tabous qui parcourent encore nos sociétés.

Des précautions à prendre avant d'arrêter de porter des culottes ?

Il y a tant de questions que l'on se pose face à ces femmes sans culottes. La première : comment font-elles pour ne pas porter de bas de sous-vêtement sous leur jean ?

"Toutes mes copines m'ont dit que ça fait obligatoirement mal, mais ce n'est pas vrai" rapporte Alice.

Pourtant, Odile Bagot, gynécologue, signale que ce combo peut causer des irritations à cause des frottements de la vulve contre la partie intérieure du jean brut.

Parce qu'il n'est pas bon de laver son jean tous les jours, un nid de germes peut se développer au niveau de l'entrejambe du denim si l'on vient à le porter plusieurs jours d'affilée sans lingerie.

"J'ai déjà fait une Marilyn Monroe un été, sans culotte à Paris"

Pour l'experte, ne pas porter de culotte est surtout dangereux, non pas pour soi, mais pour les autres.

"Si on ne porte pas de culotte et qu'on a des colibacilles pathogènes, on peut les propager sur les sièges de transports en communs (ou ailleurs, ndlr) et quand d'autres gens vont y mettre leurs mains puis les apporter à la bouche, ils vont contracter des gastro-entérites", alerte la gynécologue.

Elle complète : "Le problème ce ne sont pas les germes vaginaux puisque le vagin n'a pas de germe pathogène quand il est équilibré. Le problème, ce sont les germes digestifs, ce que l'on appelle le péril fécal. C'est la raison pour laquelle on se lave les mains quand on sort des toilettes."

Toutes nos témoins rapportent qu'elles font une entorse au "no panties" lorsqu'elles ont leurs règles. Toutes, sauf Nadine.

"Pendant les règles, j'essaie depuis maintenant deux ans d'être en "roue libre" dit-elle légèrement pour parler de flux instinctif libre. Une méthode qui consiste à autoréguler l'écoulement du sang des règles plutôt que d'utiliser des protections hygiéniques.

"Lorsque je suis à la maison, je ne mets rien et ça fonctionne. J'ai quelques tâches parfois, mais je parviens à me gérer."

La culotte, l'enseignante ne la porte que lorsqu'elle a ses règles et doit se rendre au travail afin d'éviter les accidents.

Finalement, le seul inconvénient pour celles qui adoptent ce mode de vie est de devoir surveiller leurs arrières. Ne pas brusquer des gens, faire attention à ne pas s'habiller trop court si on est pudiques…

"J'ai déjà fait "une Marilyn Monroe" un été sans culotte en plein Paris, se remémore Isabelle. "Je n'avais pas fait attention en marchant avec une amie et là, catastrophe, une bouche d'aération inopinée a fait voler ma jupe qui s'est complètement retournée sur moi."

Elle continue : "Ça a duré une seconde. J'ai redescendu ma jupe et on était mortes de rire. Ça ne m'a pas plus traumatisée que ça. C'est la canicule, les mecs se baladent torse nu… Tout le monde va se remettre de mon retourné de jupe."

Alors, prêtes à franchir le pas ?