Rome ne s’est pas construite en un jour, Giorgio Armani non plus (ou presque). Tout commence en réalité en 1975, à Milan, capitale italienne de l’élégance, dans laquelle Giorgio Armani, jeune styliste à la vocation tardive, s'associt à son partenaire Sergio Galeotti pour créer une propre marque de prêt-à-porter qui porte son nom.
Naissance d’un empire
Destinée initialement à un public 100% masculin, la première collection fait d’emblée sensation, incitant rapidement les deux associés à adapter ce premier opus au deuxième sexe avec le lancement d’une ligne femme. Son fait d’arme ? Une veste aussi chic que pragmatique, déstructurée et dépourvue de doublure, symbole d’une nouvelle approche stylistique qui deviendra sa marque de fabrique.
Un sens du tayloring impeccable qui séduit une clientèle exigeante, avec des personnalités comme Gwyneth Paltrow et Jodie Foster en guise d'ambassadrices. Marque fétiche des stars, Giorgio Armani réussit ainsi ses premiers coups d’éclat en habillant Richard Gere dans le fameux film American Gigolo ou Sean Connery dans le long-métrage Les Incorruptibles. Car le couturier italien est aussi un as du marketing qui décline son vaisseau amiral en une multitude de nouvelles marques aux cibles affinitaires savamment élaborés (Emporio Armani, Armani Jeans, Armani Exchange…) et conquiert sans cesse de nouveaux-elles client-e-s grâce à une diversification sans précédent.
Après les parfums, Armani devient en effet synonyme de cosmétiques, d’accessoires, de lunettes de soleil, de montres, de bijoux, mais aussi d’ameublement intérieur, d’hôtels ou encore de restaurants, avec une première adresse culinaire inaugurée en 1989. La marque de luxe se mue alors en un empire lifestyle colossale qui revendique aujourd’hui plus de 500 boutiques à travers le monde, avec un chiffre d’affaires de 4,5 milliards d’euros en 2022. Du jamais-vu.
Le tayloring made in Armani
Dès le lancement de sa première collection en 1975, le créateur esquisse une nouvelle élégance minimaliste, mêlant coupes impeccables, silhouettes souples, lignes revisitées, le tout sur une palette chromatique neutre, du taupe au “faux noir” en passant par les innombrables gris et beiges.
Maître du tayloring made in Italy, il brouille les frontières entre vestiaire masculin et dressing féminin sur un mode intemporel révolutionnaire, Giorgio Armani préférant décliner saison après saison son empreinte artistique - un classicisme discret et racé - en lieu et place de collections thématisées.
Son credo ? Imaginer des vêtements modernes au chic décontracté, qui accompagnent avec aisance les hommes, mais surtout les femmes, dans leur quête de liberté. Nous sommes en effet dans les années 80 et ces dernières s’émancipent du foyer pour faire carrière, comme la mode de la working girl de l’époque - à grand renfort de costumes et de tailleurs - s’en fait le précieux témoin. Sans aucun doute, la veste à épaulettes restera ainsi sa création la plus culte.
Raffinées, les pièces griffées Giorgio Armani sont aussi synonymes d’une qualité qui fait sa notoriété au-delà même des frontières italiennes, le créateur étant d’ailleurs choisi par son pays natal pour dessiner les uniformes des athlètes italien-ne-s lors des Jeux olympiques de Londres (2012) et de Rio (2016).
Et demain ?
Jusqu’alors entre les mains d’un fondateur et directeur artistique nonagénaire, le futur de la maison pose question. Qui pourra remplacer le charismatique Giorgio Armani lorsqu'il devra immanquablement céder sa place ? Certain-e-s de ses neveux et nièces collaborent déjà à ses côtés, mais il reste difficile de savoir si son empire restera indépendant après son départ.
Financièrement autonome, le groupe de luxe LVMH a déjà tenté par deux fois d’entrer au capital de la marque, en vain. À ce titre, le créateur a initié en 2016 une fondation à son nom, censée reprendre les rênes le moment venu. Comme quoi, jusqu’au bout, Giorgio Armani aura tout prévu.