Difficile de s’atteler à l’histoire tumultueuse de la marque Inès de la Fressange sans évoquer celle qui lui a donné son nom. Top model phénomène d’ascendance aristocratique, celle qui fut la muse de Karl Lagerfeld dans les années 80 avant d’être la Marianne de tous les français court les podiums des grands défilés dès ses 17 ans, de Thierry Mugler à Claude Montana.

En 1983, elle est la première mannequin à signer un contrat d’exclusivité avec une maison de couture française en devenant la muse attitrée de Karl Lagerfeld chez Chanel. Surnommée "la mannequin qui parle", Ines de la Fressange se fait vite remarquer de part son attitude vive, légère et un brin impertinente, la jeune femme longiligne n’hésitant pas à donner son avis tranché sur l’industrie de la mode ou tout simplement son métier.

Une histoire tumultueuse

Forte de son succès, la française lance sa marque éponyme en 1991 déclinant à travers des collections de prêt-à-porter abordables un style “à la française” fantasmé dont raffolent particulièrement les modeuses à l’étranger. Problème ? Reprise par François-Louis Vuitton en 1994, neveu d’Henry Racamier, le premier investisseur de la marque, Inès de la Fressange connaît dès le milieu des années 90 de sérieux problèmes financiers et présente des résultats peu concluants.

En 1999, l’actionnaire principal décide alors de licencier la fondatrice du label éponyme qui se voit rapidement dépossédée de sa petite entreprise… et de son propre nom. Sans l’aura créative de la truculente mannequin-créatrice, la marque peine à convaincre, son offre se réduisant à une poignée d’accessoires vendus ci et là sur quelques sites marchands tandis qu’Inès de la Fressange brille dans ses fonctions d’ambassadrice pour Roger Vivier ou de créatrice invitée pour quelques enseignes de prêt-à-porter.

Mais en 2013, coup de théâtre, la marque est rachetée par un nouveau fond d’investissement, Calao Finance, et Inès de la Fressange retrouve ses fonctions de directrice artistique. Enfin.

Le mythe de "La Parisienne"

Trench structurée, marinière décontractée, jean cigarette impeccablement coupé ou encore veste de tailleur faussement stricte : le style Inès de la Fressange se réclame d’un certain chic à la française, emblème auto-proclamé d’une élégance nonchalante au vestiaire intemporel. Exit les tendances, l’allure effortless de la brindille française se mue ainsi en parti-pris stylistiques un brin cliché mais qui ont le don de terriblement bien s’exporter à l’étranger. "Elle incarne dans le monde entier l’archétype de la french touch avaient d’ailleurs déclarer les nouveaux présidents de sa marque, lors du rachat en 2013.

Une allure pragmatique en somme, dont l’ex-égérie Chanel vante les secrets dans son best-seller co-écrit avec la journaliste Sophie Gachet, La Parisienne (Flammarion, 2010), édité à 1 million d’exemplaires et traduit dans 17 langues. Plus que des pièces iconiques, la femme Ines de la Fressange incarne avant tout une manière de s’habiller singulière : jouxter un smoking à une paire de baskets blanches, décoincer une robe imprimée de boots western ou parer un top à sequins d’un pantalon masculin. Un stylisme aux allures d’art de vivre, qu’Inès de la Fressange complète aujourd’hui avec des collections lifestyle incluant papeterie et objets de décoration.

Inès, nouvelle version

En tant que directrice artistique de sa propre marque, Ines de la Fressange travaille depuis 2015 en étroite collaboration avec la styliste Fleur Demery, qui façonne à ses côtés les nouvelles collections du label aujourd’hui domicilié dans une ancienne fonderie Rue de Grenelle, à Paris. La boutique aux allures de concept-store présente également une sélection d’objets chinés lors des nombreux voyages de l’ancienne mannequin.

On peut aussi bien y trouver une robe en vichy bleu que du masking tape ou encore de la vaisselle, du linge et des jouets pour enfants. Une forme de cabinet de curiosités qu’Inès de la Fressange nourrit de ses inspirations et coups de coeur en parallèle de ses nombreuses autres collaborations, avec l’enseigne Uniqlo notamment, pour qui elle a déjà réalisé une dizaine de collections.