2008. Il rêvait de Paris et de créer sa marque depuis l'âge de 9 ans. La majorité tout juste atteinte, Simon Porte Jacquemus quitte Mallemort et sa Provence natale.
Installé dans la capitale, ce petit-fils d'agriculteurs intègre l’École supérieure des arts et techniques de mode (ESMOD), avant d’abandonner, déçu par le manque d'enthousiasme des autres élèves. Aux cours magistraux, il préfère lancer rapidement sa carrière.
En 2009, il travaille brièvement à la direction artistique du magazine Citizen K et perd sa mère dans un tragique accident de voiture. Ce décès est un électro-choc qui l'incite à enfin réaliser son rêve : initier sa marque.
À 19 ans et sans investisseur, il donne naissance à sa griffe et la baptise d'après le nom de sa mère, sa muse éternelle. L'histoire de "Jacquemus" peut commencer. Sa première collection sort dans la foulée et s'appelle L'Hiver froid.
D’un happening à la Fashion Week de Paris
Celui qui gagne sa vie en tant que vendeur dans une boutique Comme des Garçons met tout en œuvre pour attirer l’attention des journalistes les plus influent-e-s. Il imagine par exemple un happening lors de la Vogue Fashion Night Out en septembre 2010 et profite de la présence des professionnel-le-s du secteur pour se faire remarquer.
Quelque temps plus tard, il organise une grève avenue Montaigne pour promouvoir L'Usine, une ligne qui met à l'honneur l'uniforme des ouvrières.
Ses militantes particulièrement élégantes ? Elles s'appellent Jeanne Damas ou Clara 3000 et font partie de sa garde rapprochée depuis ses débuts. Ce mélange d'effet de surprise et d'influence fonctionne à merveille, puisque l’année qui suit, Simon Porte Jacquemus est invité à défiler lors de la Fashion Week de Paris. À 22 ans, il devient le plus jeune créateur participant à la semaine de la mode française.
Jacquemus, une mode solaire et poétique
Avant de confectionner les vêtements qui composent une collection, Simon Porte Jacquemus pense au titre de celle-ci.
Passionné par le cinéma des années 80, mais aussi par Jean-Luc Godard, Isabelle Adjani et Jean-Paul Belmondo, il réfléchit à l'histoire, à la musique et à la performance qu’il pose sur papier. Il s’inspire notamment de ses souvenirs d’enfance dans le sud, des parasols de la Grande Motte et des champs de lavande.
Ce n’est qu’après avoir le film complet de sa saison en tête qu’il commence à créer ses habits, directement sur un mannequin de tailleur ou sur une modèle.
Alors seul designer de son studio, il dessine tout et se fournit en tissus auprès d'un spécialiste du vêtement de travail.
Les pièces ont une coupe simple, avec peu de détails, mais ont toujours ce petit quelque chose d’original.
Son style ? Il le qualifie de "naïf" et le veut accessible, presque populaire. Cette vision lui vaudra de remporter le prix spécial du jury lors du LVMH Prize en 2015.
Trois ans plus tard, il présente sa première collection masculine. En juin 2019, il fête les dix ans de sa maison avec un défilé anniversaire dans un champ de lavande haut en couleurs, puis annonce quelques mois plus tard sa volonté de ne présenter plus que deux shows mixtes par an, calqués sur le calendrier des fashion weeks masculines.
Sur ses podiums se succèdent les mannequins stars : Laetitia Casta, Gigi et Bella Hadid, Doutzen Kroes ou encore Deva Cassel. Le premier rang compte aussi son lot de célébrités, parmi lesquelles Damso, Aya Nakamura, Emily Ratajkowski, Tina Kunakey, Adèle Exarchopoulos, Beyoncé, Rihanna et Victoria Beckham.
Des pièces cultes et des muses Jacquemus iconiques
Ce qui vaut à la griffe sa viralité ? Des coloris pop, des campagnes de publicité malicieuses et des accessoires au design léché. Le meilleur exemple reste le cas du sac à main Chiquito.
Apparu pour la première fois en 2017, cet it bag a inondé les réseaux sociaux, revisité à l'infini dans des versions mini, puis micro pour enfin devenir une boucle d’oreille ou un accessoire dans les collections masculines de Jacquemus.
Même destin pour le Baci, un panier en raphia frangé, l'imposante capeline en paille Bomba déclinée sur tous les tons ou le chapeau plat XXL bien-nommé Santon.
Côté chaussures, les escarpins à talons géométriques de la collection La Bomba collent pour toujours à l’ADN de Jacquemus.
Rayon prêt-à-porter, le créateur, qui dispose désormais d'une boutique sur l'avenue Montaigne, là-même où il manifestait à ses débuts, mais aussi d'une adresse à New York et d'une autre à Londres, reste fidèle à son esthétique joyeuse, solaire et sensuelle. Comme le top transparent brodé "Pull Marine" en hommage à Isabelle Adjani, l’intemporelle robe chemise blanche Bahia et la robe longue fendue en maille Dao à porter à même la peau.
Sans oublier la veste oversize rose vif présentée lors du défilé anniversaire Jacquemus "Le Coup de Soleil".
L'autre spécialité de Jacquemus, ce sont les collaborations. Avec des personnalités qu'il convie dans ses campagnes, comme le footballeur Jules Koundé. Mais aussi avec des marques, notamment le spécialiste danois du homewear Tekla en 2022, puis Repetto deux ans plus tard.
Depuis plusieurs saisons, c'est avec Nike que Jacquemus travaille étroitement. Le dernier drop de leur partenariat est sorti à quelques jours du coup d'envoi des Jeux olympiques et réunissait une série d'égéries cinq étoiles, Serena Williams, Marie-Antoinette Katoto, Amanda Lear et Lila Grace Moss pour ne citer qu'elles.