Parmi les grands débats d’opinion qui animent l’univers impitoyable du prêt-à-porter, celui du jean et de la manière dont il se doit d’être (ou ne pas être) lavé reste sans nul doute l’un des plus enflammés.

Matière née sur les bleus de travail avant d’être anoblis par les créateurs de mode et esthètes du textile en tout genre, le denim présenterait en effet des singularités techniques rendant son nettoyage plus périlleux qu’il n’y paraît, notamment pour assurer sa longévité.

On vous explique.

Laver son jean, un débat mode encore d'actualité

Mieux vaut éviter de laver son jean. C’est du moins ce que prétendent certains gourous du denim, avec à leur tête nul autre le CEO de Levi’s qui en 2014 ravivait l’épineux débat en clamant publiquement lors d’une conférence en Californie qu’il n’avait absolument jamais lavé son jean… acheté un an auparavant.

Si sa déclaration s’inscrivait en réalité dans une conversation sur les liaisons dangereuses qu’entretiennent industrie du jean et développement durable, notamment en raison des quantités d’eau astronomique qu’elle requiert, elle reste symptomatique dans un courant de pensée puriste selon lequel il faudrait laver le moins possible son précieux denim.

Interviewée par The New York Times, la responsable du design chez Bonobos confie également qu’elle lave ses jeans le moins possible, à moins qu’ils ne soient tachés ou qu’ils ne sentent mauvais.

En France ? Même combat avec, selon Le Figaro, un Jean Touitou - fondateur d’APC et pape du jean hexagonal - qui recommande de ne (presque) jamais le laver voire même de s’offrir un bain de mer tout habillé.

Quant à ceux qui leur opposent des arguments hygiéniques ? Ces aficionados leur rétorquent qu’une nuit au congélateur suffit à tuer les bactéries indésirables, brandissant par la même occasion cette expérience d’un étudiant canadien prouvant par A + B qu’un passage en machine n’était guère plus efficace pour en venir à bout.

Éviter de laver son denim, un geste écolo ?

Pourtant, quand on y regarde de plus près, on se rend compte que les adeptes du "no washing" le sont moins pour des motifs alternatifs que pour de pures raisons de longévité du-dit jean.

En effet pour Levi's, laver de manière peu fréquente son jean permet de réduire sensiblement la consommation d’eau inhérente au cycle de vie de tout jean, une étude interne ayant démontré que les passages en machines étaient responsables de 23% de l’eau nécessaire à un denim, soit 870 litres.

Pour d’autres, la raison invoquée est purement esthétique, chaque journée passée dans son jean permettant de l’user naturellement et de façonner une patine unique et propre à son propriétaire.

"On parle de la manière dont laver ou non nos jeans car cela va déterminer ce à quoi ils vont ressembler", confirment Bryan Szabo et Thomas Stege Bojer, fondateurs du site spécialisé Denim Hunters.

En réalité, à notre connaissance, aucune étude strictement scientifique permet de prouver qu’il est plus déconseiller de laver un jean qu’une simple chemise ou un t-shirt en coton, le sens commun (et accessoirement l’inflation et le réchauffement climatique) induisant qu’on ne passe ses vêtements en machine uniquement lorsque l’on en a besoin.

Comment laver son jean ?

Finalement, s’il est communément accepté que l’on peut laver son jean, la question qui se pose relève plus des subtilités et conditions qu’implique cette proposition.

C’est ainsi que le marque de jeans Lee publie toute une série de conseils ultra-précis, recommandant de laver son jean une ou deux fois par mois, ou après 5 à 10 utilisations, avec une lessive douce et un cycle à froid pour les denim bleus, et une température un brin plus chaud pour les denims blancs, l’eau extrêmement chaude risquant de détendre les fibres du pantalon.

La marque conseille également de laver ses jeans avant de les porter pour la première fois afin d’éviter qu’ils ne déteignent sur d’autres textiles.

D’autres, comme le journaliste du The New York Times ou les Denimhunters rappellent qu’il est préférable de laver son jean à l’envers afin de préserver sa teinte d’origine, de veiller à ne pas l’essorer avec un cycle supérieur à 900 tours par minute et surtout de le faire sécher naturellement à l’air libre.

D'autres encore pourront opter pour un lavage à la main, en plongeant pendant 45 minutes leur jean préféré dans un bain d’eau froide ou d’eau tiède infusé d’une dose de lessive, avant de le rincer à l’eau froid et de le faire sécher suspendu ou à plat. Tout un programme.

Le jean brut, l’exception qui confirme la règle

Si le fait de laver ou non son jean fait autant parler, c’est aussi (et surtout) parce que la réponse varie en fonction de la matière et du type de denim dans lequel il a été coupé, et plus particulièrement lorsqu’il s’agit de denim brut.

Sans sablage, ni délavage, ces jeans tendent à être plus rigides mais aussi plus à même de s’adapter à la silhouette de leur propriétaire.

La marque de jeans Lee déconseille ainsi de laver son jean brut avant de le porter la première fois, tout comme d’autres experts qui vont globalement déconseiller de nettoyer trop régulièrement ce type de denim.

D’autres, au contraire, souligneront qu’un passage en machine régulier permettra d’obtenir une patine uniforme ou qu’un premier passage permettra de le protéger sur le long terme.

Face à de telles divisions idéologiques, la solution la plus adéquate reste de demander conseil aux vendeurs de la boutique d’achat ou au SAV de l’e-shop sur lequel vous faites l’acquisition de votre précieux jean.

En cas d’achat de seconde main, référez-vous à l’étiquette.