Blonde ou brune, hypersexualisée en body à sein conique signé Jean Paul Gaultier ou icône chaste en robe fleurie : d'album en album, la queen de la pop n’a cessé de se réinventer en jouant sur le fil de la provocation.

Simultanément vierge en robe blanche et catin en porte-jarretelles, Madonna a ouvert la voie à Britney Spears, Lady Gaga et Miley Cyrus tout en se frayant un chemin dans le milieu de la mode, habillée en ensemble Versace, chemisier Gucci par Tom Ford ou robe Louis Vuitton par Marc Jacobs.

En novembre 2021, ce caméléon du style apparaissait sur Instagram allongé sur un lit en body-string, collant résille, talons aiguille et soutien-gorge laissant deviner un téton, clin d'œil aux clichés érotiques de ses débuts.

Je suis étonnée d’avoir réussi à maintenir ma santé mentale pendant quatre décennies de censure, de sexisme, d’âgisme et de misogynie

Hier comme aujourd’hui, la sentence est sans équivoque : Madonna est censurée. "Je suis étonnée d’avoir réussi à maintenir ma santé mentale pendant quatre décennies de censure, de sexisme, d’âgisme et de misogynie", s’indigne-t-elle alors sur la plateforme.

Celle qui a transformé le sous-vêtement en tenue de jour, popularisé le chapelet et mélangé disco, country et BDSM n’a cessé de subir le sexisme car jugée trop vulgaire, tout en inspirant des tendances stylistiques ultra populaires.

Décryptage du style d’une chanteuse qui a introduit le vêtement provoc' dans la pop pour en faire un terrain de revendications féministes.

Madonna, icône de mode pro sexe mainstream

Robe blanche de mariée, Madonna fait irruption dans la culture populaire en 1984 alors que la chaîne musicale MTV se lance aux États-Unis.

En plus de ses cheveux crantés, sourcils épais et lèvres carmin, l’interprète de Like A Virgin multiplie les accessoires qui rendent son look accessible : mitaines en dentelle, chapelet de perles, accumulation de bracelets argentés et ceinture sur laquelle s’inscrit le mot "Toyboy".

En détournant l’iconographie religieuse, elle interprète un hymne pro sexe et devient une chanteuse au look grunge, décrite par la sociologue Cathy Schwichtenberg comme féministe.

Le succès mode auprès du grand public s’entérine en 1985, alors que la chaîne américaine Macy’s inaugure Madonna Land, une ligne complète regroupant des crop tops et une large game d’accessoires dont ses fameux chapelets.

En 1989, la chanteuse est la première star à apparaître à la une du magazine Vogue dirigé par Anna Wintour, qui se félicitait en 2014 : "C’était totalement controversé à l’époque".

Début 1990, Madonna abandonne le grunge et l'allure androgyne pour l’hyper féminité en corset Jean Paul Gaultier, à l’occasion de sa tournée Blond Ambition. Ancien attribut d’un corps féminin discipliné, cette pièce de lingerie aux seins hypertrophiés devient un symbole d’émancipation.

C’était totalement controversé à l’époque. 

Sur le tapis rouge, elle réhabilite la mémoire des grandes étoiles féminines qui ont marqué leur époque : Marilyn Monroe en robe bodycon surmontée de paillette signé Bob Mackie ou encore Marlene Dietrich en costume masculin.

Enfin, elle n’hésite pas à plonger dans les codes des cultures alternatifs, tel que le BDSM avec un total look cuir vinyle en 1994 dans le clip du titre Human nature, repris par Britney Spears en version rouge pour le tube Oops I did it again, six ans plus tard.

La madonne, leader d'une nouvelle génération de pop star

Tout au long des années 2000, Madonna continue son voyage stylistique, conjuguant marques grand public, jeunes créateur-rice-s et grandes maisons.

Celle qui porte des robes signées Olivier Theyskens sera aussi la première star à collaborer avec H&M en 2007.

Madonna est victime d’âgisme.

Côté look, elle détourne les codes masculinistes des cowboys red neck et introduit une nostalgie pour le disco avec son morceau Hung Up en 2005.

Entre collants et justaucorps, Madonna donne une large place à son corps, montré comme constamment discipliné et entretenu, ce qui lui vaudra d’être couronnée dès 2006 de l'étiquette de cougar.

 

"Madonna est victime d’âgisme, mais contrairement à d’autres célébrités comme Suzanne Sarandon ou Helen Mirren, elle est ramenée à une femme qui, historiquement, a utilisé son corps comme une marchandise sexualisée", écrivent les sociologues des médias Kristyn Gorton & Joanne Garde-Hansen dans un article publié en 2012.

Si aujourd’hui beaucoup de célébrités s’inscrivent dans sa lignée, Madonna recycle ses propres codes, continuant de s’afficher en cuissarde latex et robe transparente en dentelle ou cheveux nattés et robe ornée de croix au gala du Met.

Si ses mises en scène sur TikTok portent à controverse, elle confirme son statut de reine de la provoc et passe aujourd'hui le relais à des personnalités comme FKA Twigs ou Julia Fox.