On le sait depuis longtemps, les parfums ont un impact sur le ressenti émotionnel. "Lorsqu'une odeur engendre une réaction physiologique, c'est une émotion qui met la personne dans un état plus ou moins agréable", résume Cédric Manesse, neuroscientifique et responsable R&D de l'Emotionlab chez Takasago. "La dopamine peut être directement activée par l'olfaction", poursuit l'expert.
C'est le principe même de l'aromachologie, qui utilise les bienfaits des huiles essentielles afin de provoquer des actions positives sur notre cerveau. Elles font ainsi profiter de leurs vertus relaxantes, énergisantes, etc. À l'image de l'Eau Dynamisante de Clarins, imaginée par Jacques Courtin-Clarins à la fin des années 80. Mais ce n'est pas l'apanage des huiles essentielles.
Aujourd'hui, les maisons de parfums vont encore plus loin. L'Eau de Parfum Missing Person de Phlur, censée reproduire l'odeur d'une personne qui nous manque, a fait le buzz sur les réseaux sociaux. Elle aurait même fait pleurer des milliers de personnes sur TikTok. Cette fragrance ne semble pourtant pas contenir de note secrète, si ce n'est une odeur qui imite les phéromones naturelles de la peau.
Il est des parfums qui procurent des émotions positives, prouvées objectivement, comme celle de l'Eau qui Enlace créée pour Til par Francis Kurkdjian. Son impact a été testé par un centre d'études cliniques, en partenariat avec une société d'expertise émotionnelle travaillant avec des chercheurs en neurosciences, en psychologie et neurophysiologie. La marque Amoi pousse encore le curseur. Elle a concocté quatre fragrances qui contiennent un petit truc en plus : des molécules biochimiques spécifiques, capables de stimuler les neurotransmetteurs et donc, d'influer sur l'humeur, provoquant joie, relaxation, aide à la concentration... De véritables dopeurs de bien-être.
Des ingrédients vecteurs d'émotions
Depuis onze ans, Neuraé travaille sur la neurocosmétique au sein des laboratoires de recherche Sisley. "Partant du constat que les émotions impactent la peau, la marque a sélectionné des ingrédients pour leur capacité à moduler les neuromédiateurs présents dans celle-ci", explique Élise Létang, directrice marketing chez Neuraé. Il existe environ 25 neuromédiateurs communs entre la peau et le cerveau.
Or, certains d'entre eux ont le pouvoir de réduire l'inflammation et de favoriser la cicatrisation quand d'autres affaiblissent la barrière cutanée ou augmentent la douleur. Les laboratoires se sont donc penchés sur certains actifs capables d'augmenter le taux de neuromédiateurs positifs comme les endorphines (hormones du plaisir) et les GABA B (contrôle de l'anxiété). C'est le cas notamment de la scutellaire des Alpes.
Ils ont aussi cherché à faire baisser le taux de neuromédiateurs négatifs lorsqu'ils sont en excès, comme le Cortisol ou le GGRP (impliqué dans la douleur et l'inflammation). C'est dans ce sens qu'agissent l'Eperua falcata et l'indigo rouge. L'objectif ? "Limiter les effets des émotions négatives, réintroduire du positif dans son quotidien, ne plus se focaliser sur l'âge, mais sur la recherche de bien-être et d'équilibre", souligne Élise Létang.
Des textures plaisir
C’est le propre de la cosmétique que d’offrir un moment de sensorialité à l’application. Et la clé pour une bonne observance de l’usage des produits. Les laboratoires rivalisent d’ingéniosité pour formuler des galéniques incroyables, qui donnent envie d’être régulière dans leur utilisation. Textures à transformation, crèmes moelleuses ou sérums poids plume, il y en a pour tous les goûts. Elles sont souvent associées à des parfums conçus, eux aussi, pour agir sur nos émotions.
Aujourd’hui, il est possible de mesurer les émotions que procurent ces produits grâce à différentes méthodologies. On peut ainsi analyser le spectre vocal et notamment la prosodie, c’est-à-dire l’intonation, le rythme de la voix. On peut également calculer la cadence respiratoire à l’aide de capteurs thoraciques, les battements du cœur ou la température corporelle.
Le "face tracking" est un autre outil permettant d’examiner les mouvements du visage pour percevoir les émotions. Certaines marques utilisent également des électro-encéphalogrammes ou des outils qui s’approchent du détecteur de mensonges... Ainsi, Neuraé a travaillé en collaboration avec l’Université de Louvain, en Belgique, pour l’objectivation des méthodologies liées à ses formules. Chez Inishié, le rituel Awakening a fait l’objet d’une étude menée par l’Olfactome Lab de l’Université de Lisbonne, tests neuroscientifiques à l’appui, pour calculer les bienfaits sur la relaxation notamment.
Des expériences immersives
Pour optimiser l’action des soins, certaines marques redoublent d’ingéniosité. Ainsi, Claire Millier, fondatrice de Ressource Corps-Mental, a eu l’idée de les associer à des séances de sophrologie en audio. Son but ? Réparer les dégâts cutanés provoqués par l’anxiété grâce à des actifs ciblés combinés à un temps de relaxation. La sophrologue aide au lâcher-prise, à libérer les tensions, à évacuer le stress, pendant que le masque délivre ses actifs hydratants et calmants.
"La sophrologie stimule les cellules cutanées durant le temps de pose du masque", précise Claire Millier. Les bienfaits sont donc doubles.