Zac Posen, itinéraire d'un enfant (de la mode) gâté

Publié le 01/04/2024 à 08:06

Prodige, tyran, génie : celui qui a connu la gloire comme les debacles tente un énième come-back à la faveur d’un job aux allures de dernière chance : directeur artistique de GAP. Le but ? Remettre le géant de l’habillement sur les rails, mais aussi sa propre carrière.

C’est l'actu mode que personne n’attendait. Le 5 février dernier, à l'aune de la Fashion Week de New York, le groupe Gap (qui détient également Banana Republic, Old Navy et Athlera) annonçait en grandes popmpes l'arrivée d'un nouveau directeur créatif à la tête de ses collections : le créateur Zac Posen.

Une nouvelle qui n'a pas manqué de faire jaser le petite monde de la mode, tant l'union entre le géant du prêt-à-porter américain - connue de surcroit pour ses grandes difficultés financières - et l'ex-enfant chéri de la couture made in USA - disparu des radars modeux - paraissant aussi surprenante qu’impromptue.

"C’est un véritable coup de théâtre modeux !" s’est enthousiasmée Rachel Tashjian, journaliste mode du Washington Post.

"Zac Posen chez Gap est au mieux un mauvais usage de ses talents, mais j'espère me tromper !" ironise Lakyn Carlton dans un tweet plus sceptique. “ Mais je suis tellement heureuse de l'avoir de retour, quoi qu'il en soit."conclut-elle.

Pourtant, ce n’est pas la première fois que celui qui a connu l’une des carrières les plus fulgurantes de la mode contemporaine tente un retour sur le devant de la scène.

Gloire, mode et déchéance

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"L'industrie de la mode a aussi ses cotés sombres. C’est un monde qui peut être très manipulateur" confessait déjà Zac Posen en 2017 au micro de Inside Fashion, le podcast du site The Business of Fashion.

"J'ai dû prendre conscience que moi aussi j'avais fait beaucoup de mal autour de moi." À l'époque le couturier fait la promotion de "House of Z" un documentaire présenté au Festival du Film de Tribeca, qui retrace son enfance créative au cœur de Soho, ses jeunes et belles muses, certaines rencontrées au lycée, mais aussi ses meilleurs et pires moments sur le catwalk… et en backstage.

Et pour cause, celui qui a tapé dans l’oeil d’Anna Wintour dès 2002 alors qu'il n'est qu’un étudiant de 21 ans à la Central St Martins n'est pas seulement réputé pour son aptitude à confectionner des robes dignes des silhouettes les plus prodigieuses de la haute couture.

Surnommé "bébé Vogue" dès son premier show, il est repéré alors qu'une robe en soie rose qu'il avait conçue pour Naomi Campbell finit dans un article du New York Times.

Il commencera d'emblée par recevoir ses acheteurs dans le salon de ses parents et à habiller des habituées des tapis rouges… sans passer par la case débutant.

Les critiques mode du monde entier crient au génie, et en font presque malgré lui l'élu d’une industrie en quête perpétuelle de nouveaux génies.

Sa mère - avocate en finances à Wall Street et sa soeur, rejoignent l'aventure et des personnalités comme P. Diddy investissent dans l'entreprise. Le jeune Zac Posen a à peine le temps d'avoir des rêves de succès qu'ils sont déjà exaucés.

Colérique, capricieux, tyrannique, il se transforme rapidement en caricature du jeune prodige dont la gloire et l’argent lui font perdre la tête.

Puis ce sera au tour des conflits familiaux, de la crise économique de 2008 et de l’échec de son défilé haute couture à Paris de mettre un arrêt brutal à sa carrière, bien loin d’atteindre le statut de maitre drapier auquel il semblait prédestiné.

Le premier retour de l'enfant prodige

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En 2014, Zac Posen tente un premier come-back. Revenu à New York, il tente de reconquérir le coeur de sa ville natale, malgré les tensions familiales et les traumas de son premier échec.

Un premier défilé, puis un autre, suivi de l’ouverture d’un atelier de confection de pièces de haute couture et de prêt-à-porter : House of Z. "En tant qu'artisan, je pense vraiment que le luxe - parce qu’il est saturé - doit renouer avec une certaine idée de la rareté." confesse-t-il alors à Imrad Amed du Business of Fashion.

Coté tapis rouge, Zac Posen émerveille de nouveau avec des créations que les stylistes de célébrités s'arrachent sans hésiter, de Rihanna à Natalie Portman en passant par Claire Danes.

De nouveau dans l’air du temps, Zac Posen est nommé directeur créatif pour le prêt-à-porter féminin chez Brooks Brothers et rejoint le casting de Project Runway en tant que juge et remplace ainsi Michael Kors.

S’en suivra en 2017 le fameux documentaire du Festival de Tribeca et même un livre de cuisine, "Cooking with Zac", basé sur ses plats maison préférés qu'il distille sur son compte Instgram.

Mais dès 2018, c’est de nouveau la débacle : il quitte l'émission Project Runway, ferme sa propre marque pour faillite avant de voir la pandémie mettre fin à ses missions pour Brook Brothers.

Retour à la case départ.

3/3

Le job de la dernière chance ?

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Alors forcément quand Gap annonce son arrivée à la tête de l’ensemble de ses marques, il semble inutile de préciser que le petit monde de la mode attend Zac Posen au tournant.

Avec un job de costumier sur le plateau de la série Feud: Capote Vs. The Swans en guise d'ultime expérience à mettre sur son CV, le maitre du tapis rouge ne semble pas le choix le plus évident pour créer le vestiaire tout terrain de Monsieur et Madame Tout Le Monde.

Un challenge d'autant plus périlleux que ceux qui s'y sont essayé avant lui n’ont pas réussi à remettre sur pied l’empire Gap Inc., qui malgré des collaborations avec Roland Mouret, Charles Harbison et Peter Do pour Banana Republic ou encore Kanye West pour Gap, voit la menace d’une faillite se rapprocher jour après jour.

"J’ai dû affronter tous ces coups durs pour devenir une personne plus humble, un meilleur créateur, un business man plus intelligent et un meilleur leader." expliquait Zac Posen au Business of Fashion.

Espérons pour sa carrière qu'il en fasse désormais la démonstration.